Quel est l’objet de cette ordonnance ?
Avant cette ordonnance (ordonnance n°2020-315 du 25 mars 2020), en cas de force majeure amenant le consommateur ou le professionnel à annuler la prestation, un remboursement intégral était exigé – tant par le droit européen (directive voyages à forfait, dite DVAF, de 2015) que par le droit national, notamment par le code du tourisme (art L.211-14) et par le code civil (voir notamment les articles L.1218 et L.1229)
Or les annulations de voyages et de séjours touristiques, décidées pour tenir compte de l’épidémie de Covid 19, sont nombreuses ; elles continueront à l’être dans les semaines à venir. Le Gouvernement a pris la mesure des conséquences économiques qu’a sur le secteur touristique la crise du coronavirus. Dès l’adoption de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, il a modifié les conditions d’annulation des contrats de voyages touristiques et de séjours.
Le principe général de cette ordonnance est d’offrir à tous les professionnels la possibilité de proposer que le remboursement soit remplacé par un avoir d’un montant équivalent sur une prochaine prestation. Ceci évitera un décaissement immédiat de trésorerie et aidera les entreprises à passer un cap très difficile. (Il s’agit d’une possibilité offerte au professionnel ; celui-ci peut s’il le souhaite procéder au remboursement).
Cette souplesse s’applique-t-elle aux seuls forfaits touristiques ?
Le champ de la mesure a été voulu le plus large possible. Cette possibilité de proposer un avoir est offerte non seulement dans le cas des forfaits, ou de la vente pour autrui des prestations touristiques uniques (voir le champ de l’article L.211-14 du code du tourisme) mais aussi à les prestations indépendantes, telles que l’hébergement, la location de voiture et d’autres services touristiques (voir le 2°, 3° et le 4° du I de l’article L.211-2).
Quels acteurs peuvent appliquer l’ordonnance ? S’agit-il seulement d’acteurs professionnels ?
Cette souplesse peut donc bénéficier aux agences de voyages, aux tour-opérateurs, qui sont visés par l’article L.211-1. Elle peut s’appliquer, étant donné la référence aux 2°, 3° et 4° du L.211-2 du code de tourisme, aux hôteliers, aux gestionnaires de campings, de résidences de tourisme, aux loueurs de voitures mais aussi aux cabarets, aux music-halls, aux parcs de loisir, aux spas, aux centres de cure thermale... Elle peut bénéficier aux meublés de tourisme. Dans ce cas, l’ordonnance s’applique même quand le meublé est loué par un particulier. Point important : cette mesure bénéficie aussi aux associations qui offrent le même type de prestations, souvent pour répondre à des finalités sociales, notamment celles qui accueillent des mineurs. Vu l’importance de leur action, et leur exposition à la crise, il est important d’expliciter qu’elles sont dans le champ de la mesure.
En revanche, cette souplesse ne s’applique pas aux professionnels qui relèvent de la loi Hoguet, sauf lorsque la prestation annulée était un forfait touristique (par exemple, un hébergement couplé avec des forfaits de ski).
Dans tous les cas, l’ordonnance s’applique exclusivement aux relations entre la personne qui offre la prestation et le consommateur final.
Quelle est la date des annulations pour laquelle cette mesure s’applique ?
Ce sont les contrats dont l’annulation sera intervenue entre le 1er mars et avant le 15 septembre qui bénéficieront des possibilités offertes par cette ordonnance.
La période couverte a en effet été voulue étendue et rétroactive. La loi d’habilitation qui, dans sa partie économique, produit ses effets à partir du 12 mars, remonte plus loin dans le temps pour le seul secteur du tourisme, et concernera les annulations qui ont eu lieu à compter du 1er mars, En effet, déjà dans les premiers jours de mars, ce secteur subissait les effets négatifs de l’épidémie déclarée alors dans plusieurs pays étrangers.
Quel est le délai pour informer son client après l’annulation de son contrat ?
Si le professionnel choisit de proposer un avoir, il doit l’en informer dans un délai de 30 jours après l’annulation du contrat, en précisant :
- le montant de l’avoir
- les modalités d’utilisation de cet avoir
- le fait qu’il proposera une offre équivalent alternative sous 3 mois et que le client pourra également demander une prestation différente pour laquelle il pourra utiliser toute ou partie de son avoir
Si l’annulation a été notifiée avant le 26 mars (date d’entrée en vigueur de l’ordonnance), le délai de 30 jours court à partir du 26 mars, date de publication de l’ordonnance.
Quel est le délai pour proposer une offre de remplacement ?
Le prestataire aura trois mois – à compter de la date de l’annulation - pour proposer une nouvelle prestation.
Pendant combien de temps l’avoir est-il utilisable ?
Le client pourra utiliser cet avoir pendant 18 mois à compter de la date de la nouvelle proposition.
Par exemple, si le professionnel propose une offre 2 mois après l’annulation, le client aura donc 18+2 mois à compter de la date d’annulation de son contrat, pour utiliser son avoir.
La prestation de remplacement doit-elle être identique à la prestation annulée ?
De la souplesse a été largement laissée aux offres de remplacement que le professionnel pourra adapter en fonction des nouveaux souhaits du client : une prestation équivalente, une prestation d’un montant supérieur si le client le demande et pour laquelle il pourra utiliser son avoir (en ce cas, le client paie évidemment la différence), ou plusieurs séjours d’un montant inférieur. Cette souplesse constitue une incitation forte à ce que le client accepte un ou plusieurs séjours en remplacement de celui qui a été annulé.
Est-ce que le client pourra demander néanmoins un remboursement ?
Ce n’est qu’au terme du délai de 18 mois et à défaut de la conclusion d’une nouvelle prestation, que le client pourra demander le remboursement.
Le remboursement ne pourra pas s’effectuer avant ce délai.
Peut-on refuser le remboursement au client ?
L’avoir ne se substitue pas complètement au remboursement prévu par le droit. L’ordonnance a été conçue dans le respect du droit européen (voir notamment l’article 12 de la DVAF). Certes, la Commission européenne a permis une souplesse face à la crise et admis la possibilité d’offrir un voucher au lieu du remboursement, mais elle insiste sur le fait qu’il s’agit d’une option. L’ordonnance, tout en aidant le secteur du tourisme, recherche une position équilibrée avec les intérêts des consommateurs.
Le client final visé est-il seulement un touriste de loisir ?
Comme déjà indiqué, l’ordonnance s’applique exclusivement aux relations entre la personne qui offre la prestation et le consommateur final. Ce client final peut être un voyageur d’affaire, même si c’est son entreprise qui a payé la prestation touristique. Si le prestataire produit lui-même la prestation (par exemple, un hôtelier), il bénéficie de la souplesse offerte par l’ordonnance. En revanche, et toujours dans le cas des voyages d’affaires, les forfaits ne sont couverts par l’ordonnance qu’en l’absence de convention générale cadre conclue pour le voyage d’affaire, conformément à l’article L.211-7 du code du tourisme.
Commentaires
0 commentaire
Cet article n'accepte pas de commentaires.